Dans la baie du Mont-Saint-Michel, Marin Belloir s’est lancé dans la méthanisation à partir des déchets de son élevage de chevaux et ceux des producteurs de légumes des polders alentours. Cinq millions d’euros ont été investis pour construire cette unité qui produit 140 m3 de gaz par heure.
Sollicité par GRDF, propriétaire et gestionnaire du réseau de gaz naturel, Marin Belloir et son père ont décidé de s’aventurer dans la méthanisation des produits putrescibles d’origine végétale. Entre les études d’impact, la recherche de financements, les formalités administratives et la construction de l’ouvrage, trois années se sont écoulées avant la mise en service en septembre 2021.
Depuis, le méthane injecté dans le réseau GRDF chauffe des logements de Pontorson, dont les premiers sont situés à 500 mètres, et peut être distribué jusqu’à Avranches si besoin. Métha Baie a signé un contrat d’approvisionnement pour une durée de 15 ans, une durée suffisante pour amortir la centrale et atteindre assez rapidement la rentabilité.
La méthanisation, un processus naturel
La méthanisation est le résultat de la décomposition des végétaux. Celle-ci produit des gaz qu’il s’agit de capter et de filtrer pour en extraire l’eau, le souffre, l’ammoniac, les COV et le CO2. Pour accélérer ce processus naturel de dégradation, la matière est broyée avant d’être introduite dans une cuve en béton chauffée à 40 °C, additionnée d’eau et régulièrement agitée.
L’unité de Métha Baie est composée de deux cuves de 2 000 m3 et d’une infrastructure d’épuration valant à elle seule un million d’euro. Après filtrage, le gaz obtenu est composé à 98,5 % de CH4. Si la norme de conformité n’est pas respectée, GRDF coupe la vanne d’approvisionnement du réseau gaz de ville.
La matière non dégradée dans ce processus, le digestat, est réutilisée en engrais. Elle contient tous les éléments minéraux.
Accords gagnant-gagnant
Avec cette unité de méthanisation, Marin Belloir a trouvé un moyen de valoriser le fumier de cheval de son élevage. Mais cette ressource étant insuffisante pour assurer le fonctionnement de la centrale, il a fallu passer des accords gagnant-gagnant avec une cinquantaine d’apporteurs locaux. Ces derniers sont rémunérés pour nourrir les fermenteurs avec leurs déchets. Selon une table de conversion, ils récupèrent également la quantité d’azote apportée sous forme de digestat, pour amender leurs terres.
Parmi les plus gros apporteurs, Métha Baie compte sur le groupe Agrial et les producteurs de légumes de la baie du Mont-Saint-Michel, qui disposent d’un moyen de valoriser les produits non calibrés ou de mauvaise qualité. Les déchets de légumes représentent 40 % des apports, le fumier 30 %, l’ensilage 20 %…
À l’heure où l’indépendance énergétique devient une nécessité, le projet Métha Baie coche ainsi plusieurs cases vertueuses. D’abord en piégeant le méthane nocif pour la couche d’ozone, mais aussi en organisant toute une filière locale, sur un périmètre restreint.
La Caisse d’Epargne Normandie et Kiwaï dans le projet
Côté financement, Métha Baie s’est appuyé sur plusieurs partenaires pour boucler son budget de 5 millions d’euros (1).
La Caisse d’Epargne Normandie et la Banque Populaire Grand Ouest sont devenues par la suite banques prêteuses sur ce projet.
Pour augmenter l’apport personnel du jeune entrepreneur, la Caisse d’Epargne Normandie a par ailleurs activé sa plateforme de financement participatif Kiwaï. Grâce à ce crowdfunding éco-responsable normand, 100% garanti par la Caisse d’Epargne Normandie, Marin Belloir a pu lever 150 000 €… en 48 heures seulement !
(1) Parmi lesquels : Région Normandie, Europe, Bpifrance, Eiffel Gaz Vert.